Cass., 29 avril 2020, n° P.20.0378.F – Une décision de refoulement n’équivaut pas à une décision de détention : la Cour de cassation rappelle la nécessité d’un examen individuel. 

Par arrêt du 29 avril 2020, la Cour de cassation rappelle que la détention d’un étranger en vue de son refoulement ne peut être automatique. La décision visant à maintenir l’étranger aux frontières ne peut se borner à constater que l’étranger s’est vu notifier une décision de refoulement aux frontières. Au contraire, elle doit être motivée, indépendamment des motifs que contiendraient d’autres actes, au rang desquels la décision de refoulement. La motivation dont elle fait l’objet doit de plus rendre compte d’un examen individualisé de la situation de l’étranger et ne peut se résumer à une formule stéréotypée. La Cour précise ainsi l’étendue de l’exigence de motivation qui s’impose aux autorités décisionnaires, l’occasion également de revenir sur l’étendue du contrôle que peuvent exercer les juridictions d’instruction en la matière.

Cass, 2e ch., 6 mai 2020, P.20.0445.F – Les règles régissant le contrôle judiciaire d’une mesure privative de liberté à l’épreuve du contexte de pandémie.

La Cour de cassation rejette le pourvoi intenté contre une décision de la chambre des mises en accusation réformant une décision de libération rendue par la chambre du conseil compte tenu de l’absence de possibilité d’éloigner l’étranger dans un délai raisonnable dans le contexte de pandémie. Elle valide le raisonnement des juges d’appel qui effectuaient un examen de la légalité de la décision au regard des circonstances prévalant au moment de la prise de décision par l’autorité administrative, soit avant la prise des mesures de confinement. Elle souscrit par ailleurs au raisonnement selon lequel aucune illégalité ne saurait se déduire du seul fait que l’autorité administrative impose à l’intéressé une mesure de détention prévue par la loi alors que d’autres mesures moins contraignantes pourraient être prises.

Cass., 27 décembre 2017, n° P.17.1244.F/1. La Cour de Cassation ne valide pas la détention systématique des demandeurs d’asile aux frontières.

La Cour de cassation précise qu’un étranger ayant introduit une demande d’asile à la frontière ne peut être détenu par application de l’article 74-5, §1er de la loi du 15 décembre 1980 qu’à la condition que l’administration se soit livrée à une appréciation individualisée de sa situation, démontrant la nécessité de la mesure de maintien en un lieu déterminé dont il fait l’objet. En décidant du contraire, la Chambre des mises en accusation n’a pas légalement motivé sa décision.

Cass., 31 janvier 2018, P.18.0035.F. Rapatriements vers le Soudan : l’obligation d’examiner les risques de traitements inhumains ou dégradants préalablement à tout éloignement.

La Cour de cassation rejette l’argument de l’Office des étrangers selon lequel celui-ci ne serait tenu à un examen du risque de traitements contraires à l’article 3 CEDH que lorsqu’un ressortissant étranger, en l’occurrence soudanais, a introduit une demande d’asile. Le rapport publié par le CGRA, début février, adopte une position similaire.

Cass., 20 septembre 2017, R.G. n° P.17.0933.F. Le pourvoi en cassation en matière de privation de liberté d’un étranger demeure soumis à des règles procédurales distinctes de celles relatives à la détention préventive : un formalisme excessif ?

Confirmant une nouvelle fois sa jurisprudence, la Cour de cassation considère que le renvoi fait à l’article 72 de la loi du 15 décembre 1980 « aux dispositions relatives à la détention préventive » ne vise pas le régime de la détention préventive instauré par la loi du 20 juillet 1990. Par un raisonnement (excessivement) formaliste, la Cour de cassation renforce l’insécurité juridique et crée une différence de traitement injustifiée. En outre, la Cour de cassation refuse de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne quant à l’exigence d’un contrôle juridictionnel accéléré.

Cass., 26 avril 2017, n° P.17.0375.F/1. L’annexe 35 réhabilitée ?

La Cour de Cassation juge qu’un étranger sous annexe 35, bien que non autorisé au séjour, n’est pas en séjour illégal. Il n’est dès lors pas visé par l’article 25/2 de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique des personnes condamnées. Il a dès lors accès aux mesures alternatives d’exécution de la peine visant la réinsertion sociale que sont notamment la libération conditionnelle ou la mise sous bracelet électronique.

Cass. (2e ch.), 21 septembre 2016, n° P.16.0939/F. Le droit d’être entendu avant l’adoption d’une mesure privative de liberté : un obstacle à l’effectivité ?

La Cour de cassation accueille le moyen soulevé par l’Etat belge selon lequel il n’est pas nécessaire d’entendre à nouveau un étranger avant la prise d’une décision de privation de liberté en vue de la mise à la disposition du gouvernement dès lors que l’individu a déjà été entendu dans le cadre de procédures ayant un objet différent.

Cass., 31 août 2016, Darjaj Youssef. Le pourvoi en cassation dirigé contre une mesure de détention administrative d’un étranger : un formalisme approprié ?

En vertu du Code d’instruction criminelle (CIC), le pourvoi en cassation dirigé contre une mesure administrative de privation de liberté d’un étranger nécessite la signature d’un avocat titulaire d’une attestation spécifique, y compris pour le dépôt du mémoire.

Cass. (2e ch.), 15 juin 2016, n° P.16.0604.F. Le pourvoi en cassation en matière de privation de liberté d’un étranger soumis à des règles procédurales distinctes de celles relatives à la détention préventive.

Sous peine d’irrecevabilité, le pourvoi en cassation contre un arrêt de la Chambre des mises en accusation adopté en matière de privation de liberté d’un étranger doit être formé par un avocat titulaire de l’attestation visée à l’article 425, §1er, alinéa 2 du Code d’instruction criminelle. Ce faisant, la Cour de cassation se prononce sur le droit applicable à la procédure devant les juridictions d’instruction lorsque celles-ci contrôlent la légalité de la détention administrative d’un étranger.