Civ. fr. Bruxelles (Réf.), 19 janvier 2022, n°2021/164/C – Le tribunal du travail condamne la politique d’accueil et la gestion de la crise de l’accueil par les autorités belges

Le tribunal du travail affirme que le droit de présenter une demande de protection internationale et le droit à l’aide matérielle (droit à l’accueil et à l’hébergement) doivent être respectés par l’Etat belge et par Fedasil même dans une situation de saturation du réseau d’accueil. Il condamne une politique d’accueil qui consisterait à volontairement limiter le nombre de demandes d’asile en fonction de la capacité du réseau d’accueil, et rappelle le droit des demandeurs d’asile à une vie digne.

C.J.U.E., 27 février 2020, RH, C-836/18, EU:C:2020:119 – L’article 20 TFUE, le regroupement familial et l’application du droit de l’Union européenne aux situations purement internes : la Cour de justice de l’Union européenne affine sa jurisprudence.

L’article 20 TFUE s’oppose à ce qu’un État membre rejette une demande de regroupement familial, introduite par un ressortissant d’un pays tiers, conjoint d’un citoyen de l’Union qui possède la nationalité de cet État membre et qui n’a jamais exercé sa liberté de circulation, au seul motif que ce citoyen de l’Union ne dispose pas, pour lui et son conjoint, de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système national d’assistance sociale, sans qu’ait été examiné s’il existe, entre ledit citoyen de l’Union et son conjoint, une relation de dépendance d’une nature telle que, en cas de refus d’octroi d’un droit de séjour dérivé à ce dernier, ledit citoyen de l’Union serait contraint de quitter le territoire de l’Union pris dans son ensemble et serait ainsi privé de la jouissance effective de l’essentiel des droits conférés par son statut.

C.J.U.E., 19 mars 2019, Jawo, C-163/17 et C.J.U.E., Ibrahim, Sharqawi e.a. et Magamadov, aff. jointes C-297/17, C-318/17, C-319/17 et C-428/17 – Le risque qu’un demandeur d’asile soit exposé à une situation de dénuement matériel extrême empêche son transfert vers l’Etat membre normalement compétent pour le traitement de sa demande d’asile ou vers celui qui lui a déjà accordé une protection internationale.

Un demandeur d’asile ne peut être transféré vers l’Etat membre normalement compétent pour le traitement de sa demande d’asile ou vers celui qui lui a déjà accordé une protection internationale, lorsque les conditions de vie prévisibles des bénéficiaires d’une protection internationale l’y exposeraient à une situation de dénuement matériel extrême, contraire à l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants ou lorsque l’Etat membre qui a accordé la protection subsidiaire refuse de manière prévisible, et en violation de la directive qualification, d’octroyer aux demandeurs de protection internationale le statut de réfugié ou qu’il n’examine pas non plus des demandes d’asile ultérieures en dépit d’éléments ou faits nouveaux augmentant significativement la probabilité que le demandeur remplisse les conditions pour obtenir le statut de réfugié.

C.C.E., 8 mai 2018, n° 203 685 – La décision de prolongation du délai de transfert sous le Règlement Dublin III est une décision administrative attaquable devant le Conseil du contentieux des étrangers.

Dans l’arrêt commenté, le Conseil du contentieux des étrangers, saisi d’un recours en annulation et en suspension d’une « décision de prolongation de l’accord pour un transfert en exécution du Règlement Dublin », considère qu’il s’agit bien d’une décision administrative emportant des effets juridiques tombant sous sa juridiction. Après avoir considéré le recours introduit contre cette décision implicite recevable, il le déclare fondé, rappelant à l’Office des étrangers que son obligation de motivation formelle et adéquate des actes administratifs fait entièrement partie des droits de la défense, dont le respect constitue un principe fondamental du droit de l’Union européenne.

C.C.E., 15 février 2017, n° 182277. Le contrôle juridictionnel de la décision de prolongation du délai de transfert sous le Règlement Dublin III.

Dans l’arrêt commenté, le Conseil du contentieux des étrangers, saisi d’un recours en annulation et en suspension d’une décision de refus de séjour avec ordre de quitter le territoire prise en application du Règlement Dublin III, étend son contrôle de légalité à une décision de prolongation du délai de transfert en raison de la fuite invoquée du demandeur d’asile, décision qui était intervenue postérieurement à la décision attaquée et qui n’avait pas elle-même fait l’objet d’un recours devant lui. Concluant d’une part à l’illégalité de la décision de prolongation de détention prise sur base de l’article 29, §2 du Règlement Dublin III, et, d’autre part, au dépassement du délai de 6 mois visé à l’article 29, §1er du même Règlement, le Conseil déclare le recours sans objet.

Anvers (mis. acc.), 11 mai 2017, n° K/1021/2017. La détention des demandeurs d’asile faisant l’objet d’une décision de transfert en application du Règlement Dublin III : une jurisprudence en contradiction avec les garanties prévues en droit européen.

Dans l’arrêt commenté, la Chambre des mises en accusation de la Cour d’appel d’Anvers considère qu’un étranger ayant fait l’objet d’une décision de refus de séjour avec ordre de quitter le territoire prise en application du Règlement Dublin III (annexe 26 quater) doit être considéré comme un étranger en séjour irrégulier s’il se maintient sur le territoire du Royaume au-delà du délai qui lui était laissé pour quitter le territoire et gagner l’Etat membre responsable du traitement de sa demande d’asile. Dans cette mesure, elle valide une décision de maintien d’un tel demandeur d’asile basée sur l’article 7 de la loi du 15 décembre 1980 (annexe 13 septies) et considère que le Règlement Dublin III n’est pas d’application à un tel cas de figure.

C.E., 8 novembre 2016, n° 236.371.

Dans l’arrêt commenté, le Conseil d’État casse un arrêt du Conseil du contentieux des étrangers pour méconnaissance de l’autorité de chose jugée attachée à un arrêt d’annulation du même Conseil rendu dans la même affaire, en insistant sur les obligations pensant sur le Commissariat Général aux Réfugiés et aux Apatrides dans l’organisation d’une expertise psychologique d’un demandeur d’asile.

C.C.E., 29 février 2016, n°163309. Les visas humanitaires : une réponse à l’absence de voie légale d’entrée pour les demandeurs d’asile ?

Dans l’arrêt commenté, le Conseil du contentieux des étrangers estime que, au vu de la situation sécuritaire à Alep et des éléments relatif à la situation personnelle vulnérable des requérants, ces derniers ont démontré que la décision de refus de visa humanitaire, prise par l’Office des étrangers, entraînait des réels obstacles au développement de leur vie familiale avec leur membre de famille en Belgique, au regard de l’article 8 de la C.E.D.H., et ont également démontré que cette décision entraînait un risque de violation des droits protégés par l’article 3 de la C.E.D.H. Dès lors, le C.C.E. suspend, en extrême urgence, la décision attaquée.

C.C.E., 26 novembre 2015, n° 157161 et 16 février 2016, n° 162162. Le Conseil du contentieux des étrangers confirme le changement d’approche du C.G.R.A. en refusant aux demandeurs d’asile originaires de Bagdad le bénéfice de la protection subsidiaire.

Dans les deux arrêts commentés, le Conseil du contentieux des étrangers, tant dans sa section néerlandophone (arrêt n°157.161 du 26 novembre 2015) que francophone (arrêt n°162.162 du 16 février 2016), considère que la situation sécuritaire actuelle dans la ville de Bagdad n’atteint pas un niveau de violence aveugle telle qu’il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu’un civil renvoyé dans cette ville y courrait, du seul fait de sa présence, un risque réel de subir les atteintes graves visées à l’article 48/4, §2, c) de la loi du 15 décembre 1980.

Cour eur. D.H., 1er septembre 2015, Khlaifia et autres c. Italie, req. n° 16483/12. La Cour européenne des droits de l’homme condamne la détention irrégulière de migrants tunisiens sur l’île de Lampedusa dans des conditions contraires à l’article 3 de la C.E.D.H. et leur expulsion collective.

Dans l’arrêt commenté, la Cour européenne des droits de l’homme condamne l’Italie pour avoir détenu irrégulièrement des migrants tunisiens à Lampedusa, dans des conditions inhumaines et dégradantes, avant d’avoir organisé illégalement leur expulsion collective.