C.J.U.E., arrêt du 10 juin 2021, Land Oberösterreich, aff. C-94/20, ECLI:EU:C:2021:477 – Conditionner l’accès à une aide au logement à la connaissance de la langue nationale ? La Cour de justice donne son aval.

Saisie d’une question préjudicielle relative, notamment, à un cas de discrimination alléguée en matière d’accès à une aide au logement, celle-ci étant conditionnée à une connaissance de base de la langue nationale, la Cour de justice considère qu’il ne peut être question de discrimination directe ou indirecte. Le raisonnement sommaire de la Cour laisse perplexe et démontre encore une fois que le droit de la non-discrimination demeure un outil malléable dont l’apport en droit des étrangers est limité.

Cour eur. D.H., K.I. c. France, 15 avril 2021, req. n° 5560/19 – L’expulsion d’une personne réfugiée à l’aune du pluralisme juridique : entre volonté d’autonomisation et solutions paradoxales.

La Cour européenne des droits de l’homme condamne la France pour avoir autorisé le retour d’un ressortissant russe d’origine tchétchène auquel elle avait accordé le statut de réfugié, avant de le révoquer pour des motifs de sécurité nationale. La Cour juge que les autorités françaises n’ont pas suffisamment évalué les risques encourus par le requérant en cas d’expulsion compte tenu de sa qualité de réfugié et de son appartenance à un groupe ciblé.

C.C.E., 16 décembre 2020, n° 246.190 – Droit du travail et droit au travail : quelques enseignements en droit des étrangers.

N’est pas adéquatement motivée la décision de l’Office des étrangers de retirer le titre de séjour d’une travailleuse étrangère au motif qu’elle a été licenciée pour motif grave, alors même que les juridictions du travail ont refusé de reconnaitre l’existence d’un tel motif. En cas de licenciement moyennant paiement d’une indemnité compensatoire de préavis, un travailleur doit pouvoir demeurer sur le territoire puisqu’il continue à percevoir une rémunération tout au long de la durée du préavis.

Cour eur. D.H., arrêt du 30 juin 2020, Saqawat c. Belgique, req. n° 54962/18 – Détention d’un étranger en vue de son éloignement : La jurisprudence « sans objet » de la Cour de cassation condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme.

La Cour européenne des droits de l’homme condamne la pratique de l’Office des étrangers, avalisée par la jurisprudence formaliste de la Cour de cassation, consistant à délivrer des titres de détention successifs au sujet desquels les juridictions d’instruction n’ont pas le temps de se prononcer. Une fois encore, la Belgique est visée pour l’ineffectivité des recours qu’elle organise lorsqu’un étranger est détenu en vue de son éloignement.

Conseil de Prud’hommes de Paris, 17 décembre 2019, n° RG F 17/10051 – Des travailleurs étrangers sans papiers victimes d’une « discrimination systémique » : les prémisses d’un concept novateur ?

Le Conseil de Prud’hommes de Paris juge que des travailleurs d’origine malienne et sans titre de séjour en France ont été victimes d’une discrimination systémique sur leur lieu de travail. Les abus commis par leur employeur ont été facilités par le statut administratif des travailleurs. La décision ne définit toutefois pas le concept de « discrimination systémique », limitant ainsi les perspectives d’avenir.

C.J.U.E., Bajratari, aff. c-93/18, ECLI:EU:C:2019:809 et x., aff. C-302/18, ECLI:EU:C:2019:830 – L’interprétation extensive de la notion de « ressources » : leur provenance n’est pas un critère.

La Cour se prononce sur la notion de « ressources » telle qu’elle figure dans la directive 2004/38 et la directive 2003/109. Elle rappelle que la provenance des ressources n’est pas un critère pertinent et étend cet enseignement à une demande d’octroi du statut de résident de longue durée. En outre, lorsqu’il s’agit d’une demande de regroupement familial avec un citoyen de l’Union, les revenus d’un tiers, en l’occurrence un parent, peuvent provenir d’une activité exercée sans permis de travail. La Cour refuse de considérer qu’une telle activité est en soi contraire à l’ordre public, ainsi que l’invoquait le Royaume-Uni.

C.J.U.E. (G.C.), arrêt du 14 mai 2019, M. et X., X., aff. jointes C-391/16, C-77/17 et C-78/17, ECLI:EU:C:2019:403 – Sécurité nationale et exclusion du statut de protection internationale : vers une autonomie croissante du droit européen ?

La Cour de justice se prononce sur la conformité de l’article 14, paragraphes 4 et 5, de la directive qualification avec la convention de Genève. Elle estime que, malgré la possibilité de ne pas reconnaître ou de retirer le statut de réfugié à une personne présentant une menace pour la sécurité nationale, la directive assure un niveau de protection suffisant. Ce faisant, l’arrêt de la grande chambre marque l’autonomie du droit européen par rapport à la Convention. La Cour précise également les droits des personnes exclues de la protection statutaire mais néanmoins non-expulsables, en raison du risque de persécution en cas de retour.

C.J.U.E., 7 novembre 2018, C et A, C-257/17, ECLI:EU:C:2018:876. Conditions d’intégration et droit de séjour autonome en matière de regroupement familial : oui, mais… 

La Cour de justice valide les conditions d’intégration imposées par les Pays-Bas aux ressortissants de pays tiers ayant bénéficié du regroupement familial sur la base de la directive 2003/86 lorsqu’ils demandent l’octroi d’un titre de séjour autonome. La Cour rappelle que l’objectif est de faciliter l’intégration des personnes étrangères. Au regard de cet objectif, le juge européen tente d’encadrer la marge de manœuvre des États membres. Suivant la jurisprudence européenne, la Cour constitutionnelle belge a admis la légalité de la condition générale d’intégration prévue à l’article 1er/2 de la loi du 15 décembre 1980.

C.C., 19 juillet 2018, arrêt n° 93/2018 – Le régime des permis de travail devant le juge constitutionnel : une nouvelle occasion manquée ?

Saisie par le Conseil d’État de questions préjudicielles, la Cour constitutionnelle est interrogée, d’une part, sur la compatibilité de l’habilitation accordée au Roi par la loi du 30 avril 1999 relative à l’occupation des travailleurs étrangers avec le principe de légalité et, d’autre part, sur le respect du principe d’égalité par le régime des permis de travail. La Cour constitutionnelle s’inscrit dans la lignée de sa jurisprudence antérieure mais l’affaire n’est pas close, pour autant.

C.J.U.E., K. et H.F., aff. jointes C-331/16 et C-366/16, 2 mai 2018, ECLI:EU:C:2018:296. Exclusion et restriction à la libre circulation pour le membre de la famille du citoyen : à évaluer au cas par cas.

La nécessité d’une restriction de la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, soupçonné d’avoir participé, dans le passé, à des crimes de guerre, doit être évaluée au cas par cas. Le fait que la personne concernée ait fait l’objet, dans le passé, d’une décision d’exclusion du statut de réfugié ne peut pas automatiquement conduire à la constatation que sa simple présence sur le territoire de l’État membre d’accueil constitue une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société.