C.J.U.E. (GC), 14 décembre 2021, V.M.A. contre Stolichna Obshtina, rayon “Pancharevo”, C-490/20, ECLI:EU:C:2021:296 – La reconnaissance des actes de naissance mentionnant comme parents deux personnes de même sexe dans l’Union européenne : analyse à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice

La Cour de justice, en grande chambre, impose aux Etats membres de reconnaitre, pour l’exercice du droit à la libre circulation, l’acte de naissance établi par les autorités de l’Etat membre d’accueil qui mentionne comme parents deux personnes de même sexe. Si l’enfant a la nationalité d’un Etat membre, la Cour de justice enjoint par ailleurs à cet Etat membre de lui délivrer une carte d’identité ou un passeport, sans requérir au préalable l’établissement d’un nouvel acte de naissance. Sans aller jusqu’à assurer l’accès à la citoyenneté de l’Union à leurs enfants, la Cour complète sa jurisprudence Coman en favorisant la libre circulation des liens de filiation établis dans le cadre des familles homoparentales. Ce faisant, la Cour fait un pas supplémentaire vers la reconnaissance (quasi) automatique des éléments du statut personnel.

C.J.U.E. (GC), 9 novembre 2021, Bundesrepublik Deutschland, C-91/20, EU:C:2021:898 – Effectivité du principe de l’unité familiale des réfugiés : le choix du statut le plus favorable pour l’enfant.

La Cour de justice de l’Union européenne, en grande chambre, juge que la loi qui accorde le statut de réfugié dérivé à l’enfant, né d’un père syrien reconnu réfugié en Allemagne et d’une mère tunisienne, n’est pas incompatible avec la logique de la protection internationale. Cette interprétation permet le maintien de l’unité familiale du réfugié. Même si l’enfant bénéficie de la nationalité tunisienne, la Cour estime que le statut le plus favorable peut lui être octroyé en raison de l’intérêt supérieur de l’enfant et de l’application du principe de l’unité familiale des réfugiés, à condition qu’il n’y ait pas de raisons pour exclure l’enfant du statut de réfugié sur la base de l’article 12 de la Directive 2011/95.

C.J.U.E., 28 octobre 2021, ASGI e.a., C-462/20, EU:C:2021:894 – Les contours des clauses d’égalité de traitement entre ressortissants de pays tiers et nationaux au départ de l’arrêt ASGI e.a. de la Cour de justice de l’Union européenne.

L’arrêt ASGI e.a. de la Cour de justice de l’Union européenne contribue à sa jurisprudence sur l’étendue des clauses d’égalité de traitement dans les directives européennes qui régissent les différents statuts juridiques des ressortissants de pays tiers. Il s’agit de la première affaire dans laquelle la Cour interprète les clauses d’égalité dans l’accès aux biens et aux services offerts au public. L’arrêt fournit une occasion de revenir sur cette jurisprudence et de la replacer dans le contexte des questions préjudicielles déjà posées à la Cour dans cette matière.

C.J.U.E., arrêt du 10 juin 2021, Land Oberösterreich, aff. C-94/20, ECLI:EU:C:2021:477 – Conditionner l’accès à une aide au logement à la connaissance de la langue nationale ? La Cour de justice donne son aval.

Saisie d’une question préjudicielle relative, notamment, à un cas de discrimination alléguée en matière d’accès à une aide au logement, celle-ci étant conditionnée à une connaissance de base de la langue nationale, la Cour de justice considère qu’il ne peut être question de discrimination directe ou indirecte. Le raisonnement sommaire de la Cour laisse perplexe et démontre encore une fois que le droit de la non-discrimination demeure un outil malléable dont l’apport en droit des étrangers est limité.

CJEU, judgment of 20 May 2021, L.R., case C-8/20, EU:C:2019:219 – It’s not one of us! The Dublin System and associated countries: the Court of Justice clarifies the position of Norway.

In L.R., the Court of Justice deals with the involvement of Norway in the Dublin system. The key issue is whether an asylum application previously examined and rejected in a Dublin-associated country (like Norway) may be declared inadmissible as ‘subsequent application’ by an EU Member State. The Court rules that this is not possible: an asylum application cannot be dismissed on the ground that Norway has already rejected it, which means that EU Member States have to re-examine the application and process it ex novo. Although Norway applies the Dublin Regulation, it is not bound by the EU Asylum Directives and is not a member of the EU, nor cannot be treated in the same way as a Member State.

CJUE, arrêt du 12 juin 2021, CF, DN / Bundesrepublik Deutschland, (C-901/19) – Comment mesurer le degré de violence aveugle d’un conflit armé aux fins d’appréciation d’une demande d’octroi de la protection subsidiaire?

Le Tribunal administratif supérieur de Bade-Wurtemberg (Allemagne) est saisi de la demande de protection internationale de deux Afghans originaires de la province de Nangarhar (Sud-est de l’Afghanistan). Il suspend la procédure interne et interroge la Cour de Justice quant aux critères applicables en droit de l’Union européenne pour octroyer la protection subsidiaire dans une situation de violence aveugle générée par un conflit affectant la population civile au sens de l’article 15, sous c).

C.J.U.E. (G.C.), arrêt du 15 avril 2021, H.A. / État belge, C-194/19 – Recours effectif et transfert Dublin : le juge national doit tenir compte des circonstances postérieures à l’adoption de la décision de transfert Dublin.

La Grande Chambre de la Cour de Justice de l’Union européenne, interrogée par le Conseil d’Etat belge, se prononce de nouveau sur le droit au recours effectif au sens du Règlement Dublin III. La Cour précise l’étendue du contrôle juridictionnel national sur la décision de transfert Dublin. Le contrôle du juge national doit comporter un examen ex nunc de la situation du demandeur d’asile, ce qui suppose une prise en compte d’éventuelles circonstances postérieures à l’édiction de la décision, déterminantes pour la correcte application dudit Règlement. Tout en laissant aux États une marge de manœuvre dans leur organisation procédurale, la Cour confirme qu’une des composantes de l’effectivité du recours contre le transfert Dublin, au sens du droit de l’UE, est un examen qui doit être complet et actualisé mené par le juge national.

C.J.U.E, 11 mars 2021, M.A., C-112/20, EU:C:2021:197 – L’affaire M.A. : la Cour réaffirme la portée large du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dans le contexte de la directive retour.

Dans son arrêt récent du 11 mars 2021, rendu dans l’affaire M.A. contre la Belgique, la Cour de justice de l’Union européenne a affirmé que l’article 5 de la directive retour, lu en combinaison avec l’article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, impose aux États membres de tenir dûment compte de l’intérêt supérieur de l’enfant avant d’adopter une décision de retour, même lorsque le destinataire de cette décision n’est pas le mineur lui-même, mais le père de celui-ci. Ainsi, la Cour souligne l’importance du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et la nécessité d’une interprétation large de ce principe.

C.J.U.E., 14 janvier 2021, TQ, C-441/19, EU:C:2021:9 – Pas d’éloignement sans une solution durable réelle et effective pour le MENA.

En cas de renvoi d’un mineur étranger non accompagné (MENA) vers son pays d’origine, l’État doit s’assurer d’un accueil sur place, qui soit adapté et prenne en compte l’intérêt supérieur de l’enfant. En cas de changement de circonstances entre la décision de retour et son exécution, la solution doit être adaptée (évaluation ex nunc). Les règles concernant les mineurs et la prise en compte de leur intérêt supérieur sont les mêmes pour tout MENA de moins de 18 ans. Si une solution adaptée a été trouvée dans le pays d’origine, la décision de retour doit être exécutée. Si elle ne l’est pas, le MENA a droit au séjour dans le pays d’accueil.

C.J.U.E., 20 janvier 2021, OA, C-255/19, EU:C:2021:36 – L’affaire OA : un autre pas vers une interprétation complète de la notion de la ‘protection’ dans la directive qualification.

La Cour de Justice de l’Union européenne a été saisie de questions préjudicielles par le Tribunal Supérieur du Royaume-Uni. Au cœur de la demande se trouve notamment la question de la notion de la « protection » selon la directive qualification. En effet, la CJUE est interrogée sur l’interprétation de cette notion, afin de déterminer si celle-ci recouvre le soutien financier et sécuritaire par les membres de la famille et proches de l’individu voire par les membres de son clan. Dans cet arrêt, la CJUE rend une décision cruciale : ni les membres du clan, ni les proches de l’individu peuvent être considérés comme les acteurs capables d’assurer une protection au titre des exigences de l’article 7 de la directive. En outre, la Cour explicite que la notion de la protection est la même dans l’article 2 (c) qui concerne l’octroi du statut de réfugié, l’article 7 (1) et (2) qui concerne les acteurs de protection, ainsi que l’article 11 (1) (e) concernant la cessation du statut de réfugié.