Comité des droits de l’enfant, 4 février 2021, R.H.M. c. Danemark, Communication n° 83/2019 – La protection contre les mutilations génitales incombe à l’État d’origine et non aux parents des mineurs.

Dans sa communication n° 83/2019 du 4 février 2021, le Comité des droits de l’enfant conclut à la violation des articles 3 et 19 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant par le Danemark. Il reproche à l’État défendeur le retrait des permis de résidence de l’auteure et ses deux enfants suivi d’une décision d’expulsion vers la Somalie où elle risque d’être sujette à des mutilations génitales féminines. Par cette décision, le Comité s’inscrit dans sa jurisprudence antérieure établie depuis sa communication n°3/2016 tout en nuançant ses enseignements en dépit du refus de l’État défendeur de s’y conformer.

Cour eur. D.H., 21 octobre 2021, Selygenenko et autres c. Ukraine, req. n°24919/16 – Vers la suppression de la condition de résidence en faveur des migrants forcés.

Dans son arrêt de chambre du 21 octobre 2021, la Cour européenne des droits de l’homme condamne l’Ukraine pour violation de l’article 1 du Protocole n° 12 (interdiction générale de la discrimination) au sujet du refus des autorités d’autoriser aux requérants de participer aux élections locales à Kiev en 2015. Le raisonnement de la Cour repose sur le principe d’égalité et de non-discrimination en raison de la non-prise en compte de la situation particulière des requérants. Sans remettre en cause la conformité de la condition de résidence à l’article 3 du Protocole n° 1 (droits politiques) réaffirmé dans l’affaire Sitaropoulos et autres contre Grèce(GC), la Cour prend en compte la situation particulière des requérants comme dans l’affaire Melnitchenko contre Ukraine.

Comité de recours du Burundi, 18 janvier 2018, X c. la Commission consultative pour les étrangers et les réfugiés, no 318-17C00143 – Conséquences de l’absence injustifiée du réfugié au camp.

Le Comité de recours (deuxième et dernière instance en matière d’asile au Burundi) se prononce sur le refus de la Commission consultative pour les étrangers et les réfugiés (première instance d’asile) de reconnaitre le statut de réfugié au requérant en raison d’un dépôt tardif de sa demande d’asile. Après examen, le Comité lui reconnait le statut de réfugié sur base de l’article 5, alinéa 3, de la loi no 1/32 du 13 novembre 2008 sur l’asile et la protection des réfugiés au Burundi. Le Comité reproche à la Commission consultative de considérer la demande du requérant comme tardive alors qu’il s’agit d’une demande nouvelle introduite après la désactivation de la première demande.

Cour d’appel de Mons, 15 octobre 2019, n° 2016/RG/172, Service fédéral des pensions contre X – Nationalité et résidence dans l’accès à la pension de retraite coloniale.

Dans un arrêt très succinct, la Cour d’appel de Mons reconnait à un requérant « Belge de statut congolais » le droit à une pension de retraite pour les services prestés de 1947 à 1960 au sein de l’administration d’Afrique. Le raisonnement de la Cour repose essentiellement sur l’arrêt n° 137/2018 de la Cour Constitutionnelle de Belgique. Après avoir écarté la condition de nationalité prévue par l’article 1er des lois relatives au personnel d’Afrique coordonnées le 21 mai 1964, la Cour d’appel de Mons reconnait le droit d’accès à la pension de retraite sur base du critère de résidence. Le présent commentaire s’interroge sur la conformité de la condition de résidence par rapport au principe d’égalité et de non-discrimination dans un régime contributif. L’exigence de résidence ne constitue- t- elle pas une discrimination indirecte sur la base de la nationalité ?

C.C.E., 6 mai 2019, n° 220747 – L’enregistrement auprès de l’UNRWA : une présomption réfragable du bénéfice effectif de l’aide.

Le Conseil du contentieux des étrangers reconnait la qualité de réfugié à un requérant palestinien originaire de la bande de Gaza sur base de l’article 1, D, de la Convention de Genève. Il reproche au Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides de faire peser sur le demandeur la charge de prouver le bénéfice effectif de l’aide UNRWA alors qu’il est enregistré. Son raisonnement repose sur les enseignements tirés des arrêts El Kott et Bolbol de la Cour de justice de l’Union européenne.

Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud, 18 décembre 2018, Alex Ruta c. ministère de l’Intérieur, arrêt n° CCT 02/18 – Principe de non-refoulement et demandeur d’asile en situation irrégulière.

La Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud se prononce sur le refus des autorités sud-africaines de reconnaitre à un requérant en situation irrégulière le droit de demander asile au motif que « it was too late for him to apply ». Pourtant, ni la tardiveté de la demande d’asile ni la régularité de la présence ne constituent des causes d’exclusion au statut de réfugié. La Cour constitutionnelle le confirme en lui appliquant le principe de non-refoulement et en rappelant que la tardiveté est plutôt à prendre en compte lors de l’examen de la crédibilité du requérant.

C.C., arrêt n° 133/2018, 11 octobre 2018. Nationalité et sous nationalité dans l’accès à la pension de retraite coloniale : le cas des Belges de statut congolais.

Par l’arrêt n° 133/2018, la Cour constitutionnelle belge se prononce sur la conformité de l’article 1er des lois relatives au personnel d’Afrique avec les articles 10 et 11 de la Constitution belge combinés aux articles 14 de la Convention européenne des droits de l’homme et 1er du Premier protocole additionnel. Dans son raisonnement, la Cour considère que l’article 1er des lois relatives au personnel d’Afrique interprété comme excluant les « Belges de statut congolais » de la pension de retraite coloniale est discriminatoire. Ce commentaire évalue le raisonnement de la Cour constitutionnelle belge, à la lumière de sa jurisprudence antérieure et à celle de la Cour européenne des droits de l’homme.

C.C.E., arrêts nos 195 323 et 197 537 respectivement du 23 novembre 2017 et du 8 janvier 2018. Quand une demande d’asile engendre un risque de persécution dans le pays d’origine.

Dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction, le Conseil du contentieux des étrangers reconnaît le statut de réfugié à deux ressortissants burundais. En dépit de l’absence de crédibilité dans le chef des requérants, il déduit la crainte de persécution à partir du dépôt de la demande de protection internationale en Belgique. Pour évaluer leur demande d’asile, le Conseil suit les lignes directrices de la Cour de Strasbourg. Selon ces lignes, les autorités nationales ne peuvent pas ignorer les éléments de preuve objectifs découlant des rapports émanant d’organes relevant des Nations Unies, d’O.N.G. ou de services gouvernementaux. Appliquées aux cas d’espèce, le Conseil reproche à la partie défenderesse d’avoir ignoré la situation générale dans le pays d’origine alors qu’elle est attestée par différents éléments de preuve objectifs.

Comité droits de l’homme des Nations unies, communication n° 2640/2015, R.I.H. et S.M.D. c. Danemark, 13 juillet 2017. Traitement dégradant et conditions de vie misérables.

Le Comité des droits de l’homme considère que le renvoi d’une famille syrienne, bénéficiaire de la protection subsidiaire, vers la Bulgarie ne constitue pas un traitement dégradant au sens de l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le Comité justifie sa décision en arguant l’absence de vulnérabilité dans le chef des auteurs de la communication. Leur situation n’est pas la même que celle dans l’affaire Jasin contre Danemark, dans laquelle le Comité a conclu à la violation de l’article 7 en raison du renvoi vers l’Italie d’une famille somalienne composée d’une mère célibataire et de trois enfants malades. Par ce raisonnement, le Comité adopte une approche conjoncturelle et individualisée des traitements cruels, inhumains, dégradants. Le Comité relativise donc ce droit en principe absolu en exigeant « a special situation of vulnerability », selon une échelle ascendante. Ce qui hier était un traitement dégradant peut ne pas l’être aujourd’hui en raison d’une approche individualisée de la notion de vulnérabilité.

Cour eur. D.H., N.D. et N.T. c. Espagne, 3 octobre 2017, req. nos 8675/15 et 8697/15. Expulsions collectives et crises migratoires.

Dans un contexte de crises migratoires, la Cour européenne des droits de l’homme condamne l’Espagne pour l’expulsion d’une centaine des migrants en violation des articles 4 du Protocole n° 4 et 13 de la Convention européenne des droits de l’homme. La violation de l’article 4 du Protocole n° 4 découle de l’absence d’une procédure d’identification des requérants lors de leur expulsion. La violation de l’article 13, combiné avec l’article 4 du Protocole n° 4, résulte quant à elle de l’impossibilité, pour les requérants, de bénéficier d’une voie de recours contre leur expulsion. Après avoir rejeté les arguments de l’État défendeur fondés sur le contexte migratoire caractérisé par l’afflux massif des migrants, la Cour adopte une approche de la notion d’expulsion collective fondée sur le principe de non-discrimination plutôt que sur le contexte de crises migratoires. Dans son opinion partiellement dissidente, le juge Bedov reproche à la Cour de maintenir « ses normes élevées » dans un tel contexte.